Wailo : le pompier devenu entrepreneur qui veut réinventer le répertoire téléphonique
- La rédaction d'Orléans Capitale

- 2 sept.
- 7 min de lecture
Vincent Laine-Brinon, ancien pompier de Paris devenu entrepreneur, a troqué le casque pour une vision ambitieuse : révolutionner la gestion des contacts professionnels. De ses débuts dans les tutos web à la création de Wailo, un répertoire intelligent porté par l’IA, il incarne une nouvelle génération de fondateurs, à la croisée de la tech et de l’humain. Rencontre avec un créatif résilient, bien décidé à faire rayonner Orléans dans l’univers numérique.

Votre parcours en un mot ?
Atypique. J’ai toujours rêvé d’être pompier. À 12 ans, j’étais Jeune Sapeur-Pompier, à 16 volontaire, puis Pompier de Paris à 18 ans. Mais en parallèle, j’étais fasciné par le web. En 2008, je lance le premier site de tutos vidéo en France. En 2016, je conçois la première carte de visite virtuelle utilisable sans application. En 2021, je me spécialise dans la gestion des contacts professionnels avec une première startup à Lyon. Puis en 2024, je lance une app de scan de cartes de visite boostée par l’IA, avant de créer en 2025 Wailo, le premier répertoire intelligent dédié aux pros.
Pourquoi l'entrepreneuriat ?
Je suis avant tout un créatif. Comme tout entrepreneur, tout part d’une idée : repérer un besoin, imaginer une solution, réunir les ressources, faire des tests, ajuster… jusqu’à sortir un produit que des gens sont prêts à utiliser. En somme, comprendre la souffrance des autres, se rendre utile et aider. Finalement, ce n’est pas si éloigné de mon métier initial.
Le plus grand défi en tant qu'entrepreneur ?
Le temps. Garder le cap quand tout semble vouloir te détourner : les problèmes techniques, les imprévus, le manque de financement, les délais qui s’allongent, les deals qui tombent à l’eau… Et surtout, les personnes qui gravitent autour de toi, te font espérer, mais te font surtout perdre un temps précieux. Trouver tes premiers clients, atteindre la rentabilité, continuer d’innover pour ne pas se faire rattraper… Le défi, c’est d’avancer, malgré tout.
En quoi consiste votre startup ?
Wailo est une application mobile qui remplace le répertoire classique de votre téléphone par une solution intelligente, simple et toujours à jour. Elle permet déjà de créer, enrichir et mettre à jour automatiquement les données publiques de vos contacts professionnels.
Je repense le répertoire téléphonique comme un réseau social. Après tout, c’est là que se trouvent vos premiers liens professionnels : vos clients, vos prospects, vos collègues, vos partenaires… bref, votre business. Dans les prochains mois, Wailo deviendra collaborative : les équipes pourront partager leurs contacts d’une manière encore inédite et se connecter à leurs logiciels métier.
L'inspiration derrière votre projet ?
À une certaine période de ma vie, j’ai géré plusieurs projets en même temps, avec à chaque fois des cartes de visite à distribuer. Un changement d’adresse e-mail, et hop, il fallait jeter les anciennes, en refaire de nouvelles. Une carte par casquette… c’était fastidieux à gérer, et à enregistrer. C’est ce qui m’a poussé à créer ma propre carte de visite virtuelle.
En 2021, je me spécialise dans la gestion des contacts avec un CRM dédié à l’administration de flottes de cartes virtuelles. Mais avec le temps, j’ai compris que ce n’était qu’un outil de plus, pas une solution. C’est en 2024 que l’illumination me vient : l’idée n’est pas de créer une énième application… mais de recycler une vieille app que tout le monde connaît déjà : le répertoire téléphonique, et de le réinventer.
C’est une app installée par défaut sur 5,7 milliards de smartphones dans le monde.
Votre équipe en une phrase ?
Petite mais redoutablement efficace : deux développeurs seniors orléanais, spécialisés en applications mobiles et en intelligence artificielle, avec une solide expérience entrepreneuriale et des projets déjà réalisés dans la téléphonie mobile.
Le premier pas pour lancer votre entreprise ?
À peine arrivé à Orléans en mars 2024, dans un contexte professionnel et personnel difficile, je me suis immédiatement remis au travail. L’objectif n’était pas encore de lancer Wailo, mais de créer un MVP solide : HUB. C’était un scanner de cartes de visite papier, avec une touche d’IA capable de structurer automatiquement les fiches, d’identifier les sites web et de générer des mots-clés pertinents pour faciliter la recherche de contacts.
Ce prototype m’a permis de tester le marché, de valider l’intérêt de l’IA dans ce domaine, et surtout, d’intégrer le programme d’accélération de la Technopole d’Orléans : SAXO45. Après 8 mois de développement intensif, Wailo est né en juillet 2025.
Objectif principal cette année ?
Trois objectifs majeurs : Développer les fonctionnalités sociales de Wailo pour faciliter la gestion des contacts à 360° dans les entreprises. Honorer les partenariats en cours de finalisation, notamment dans la GMS (grande distribution). Lever nos premiers fonds pour accélérer notre croissance.
Votre différenciation principale ?
C’est ma vision qui me différencie : je réinvente la manière de gérer les contacts. Je ne me contente pas de proposer du partage de coordonnées ou la création de fiches. Avec Wailo, l’IA rend votre répertoire autonome : elle s’occupe de vos contacts pour vous. Demain, elle deviendra même proactive et vous proposera des actions pour renouer le lien professionnel. Mais chut… ne le dites à personne. Mes concurrents risqueraient de s’en inspirer !
Contribution à l'économie locale ?
Je suis profondément reconnaissant de l’accueil que m’a réservé Orléans. Mes développeurs sont orléanais, et dès que j’aurai levé mes premiers fonds, je prévois de recruter deux alternants issus d’une école locale pour les épauler. Je suis également en discussion avec un opérateur de datacenter orléanais pour y installer mes propres serveurs et y héberger notre IA. Je vais aussi m’entourer d’entreprises locales, leaders dans leurs domaines, pour proposer à mes utilisateurs des services additionnels et offrir à ces entreprises l’accès à de nouveaux marchés dans la tech.
J’ai pour ambition de faire de Wailo une société internationale, reconnue, qui impose un nouveau standard dans la gestion des contacts. Je compte bien faire rayonner Orléans dans la tech, et peut-être attirer de nouveaux talents dans notre région.
Innovation clé apportée ?
L’innovation clé est à venir, et elle repose sur une vision recentrée sur l’utilisateur, plutôt que sur la technologie pure. L’IA n’est là que pour apporter un appui technique. Tout comme la connexion Internet, elle n’est qu’un moyen d’atteindre un résultat, pas une fin en soi. La multiplication des réseaux sociaux, des adresses e-mail ou des numéros professionnels a, paradoxalement, rendu le contact plus compliqué. Wailo proposera bientôt une alternative unifiée, où l’utilisateur sera au centre de son réseau. Je compte bien renvoyer le terme vCard là où il doit être : à l’âge de pierre et des téléphones à clapet. Attendez-vous à une vraie révolution.
Comment gérez-vous le stress ?
J’ai un mental d’acier. Je suis ce qu’on appelle “anti-fragile” : comme un os qui se renforce sous la pression, chaque choc me rend plus solide, plus lucide, et plus précis dans mes choix. Pour moi, les seules choses vraiment importantes dans la vie sont les gens qu’on aime. Tant qu’il ne leur arrive rien… tout le reste, je relativise. Mes armes : l’humour, le recul, et mes rêves nautiques.
Un conseil pour les aspirants entrepreneurs ?
Oh que oui ! Restez pragmatique. Un jour, une personne me dit : “Quelle idée de génie ! Mon fils aimerait bien trouver une idée lui aussi et devenir millionnaire.” Je lui ai répondu : “Ce n’est pas une idée de génie, c’est une idée toute bête. En réalité, il s’agit juste de remettre à jour une application oubliée. Internet a numérisé les supports : les photos sont devenues des JPEG, les disques des MP3, les DVD des MP4… Eh bien, avec l’IA, c’est pareil : dites à votre fils de se replonger dans les applications des années 2010, et d’automatiser tout ce qui, à l’époque, se faisait encore à la main par l’utilisateur.”
Vision à long terme ?
Imposer un nouveau standard mondial dans la gestion des contacts. Wailo ne sera pas simplement une application, mais un réflexe comme WhatsApp pour discuter, ou LinkedIn pour réseauter. Demain, quand on pensera “répertoire”, on pensera Wailo.
Une chose que vous changeriez ?
C’est une question philosophique. J’ai perdu beaucoup d’argent dans ma précédente aventure entrepreneuriale. Sur les dernières semaines, tout est allé très vite : nous avons dû déménager en cours d’année, alors que ce n’était pas prévu. Il a fallu trouver une nouvelle école pour les enfants pendant les vacances de février, en seulement quinze jours. Mon épouse a dû rechercher un nouveau travail. Nous ne bénéficions d’aucune aide d’état, et mes parents nous ont temporairement aidés à nous reloger…
Nous avons traversé une période très difficile. Alors, qu’est-ce que je changerais ? Rien du tout. Vous savez, plus une formation est coûteuse, plus elle vous instruit. J’ai payé cher… mais j’en suis sorti plus fort, professionnellement et personnellement.
Votre passe-temps favori ?
Quand j’habitais à Bordeaux, j’adorais prendre mon bateau (au port du Verdon-sur-Mer) pour aller me promener en famille. On partait sur l’île de Cordouan, on mettait le bateau à l’échouage, on pique-niquait, on jouait dans les vagues avec les enfants… Depuis mon départ à Lyon en 2022, mon bateau est sur cale, dans un hangar. Alors on a un peu perdu l’habitude des pique-niques, mais ma passion reste la même : passer du temps avec ma femme et mes deux enfants. Jeux de société, des plateaux fromage et charcuterie devant un bon film… Et toujours en tête : remettre le bateau à l’eau… ou en faire l’annexe de mon prochain.
Un événement ou festival local favori ?
J’ai redécouvert avec plaisir les Fêtes Johanniques, avec une organisation incroyable : les spectacles son et lumière sur la cathédrale, les cérémonies, les défilés… Et au-delà de ça, j’ai un faible pour les ambiances de village : les petites guinguettes, les fêtes de quartier, « les foires à la saucisse »… C’est simple, mais ça rassemble. Et ça me plaît.
Incontournable à visiter dans la région ?
J’aime beaucoup visiter les églises. Je suis toujours impressionné par l’entreprise que cela représente : la précision des assemblages, les défis techniques, l’harmonie architecturale où les proportions divines sont omniprésentes. Je recommande particulièrement l’église Saint-Marceau, dans le quartier où je réside. Elle devient un lieu magique lors de la fête de la Saint-Fiacre : entièrement décorée de fleurs et baignée de lumière pendant cinq jours. Immanquable.
Un lieu secret à partager ?
La Paillotte, à Orléans, sur les quais de Prague. C’est un vrai lieu de détente, où les gens du quartier se retrouvent pour partager des planches, boire un verre, écouter des concerts, amateurs, avec une vue sur la Loire. Et le plus beau, c’est que tout ça est organisé chaque été, bénévolement, par une poignée d’habitants du quartier. Un esprit guinguette, chaleureux et sincère… comme on n’en fait plus.
Votre équilibre vie pro/perso ?
C’est encore un vrai défi. J’aimerais pouvoir consacrer plus de temps à ma famille, mais en phase de lancement, les besoins du projet imposent un rythme intense. Aujourd’hui, je passe environ 80 % de mon temps à travailler, et 20 % avec mes proches. Parfois, je me demande si je ne suis pas en train de saboter les futurs souvenirs de mes enfants. Vous savez, ces moments qu’on évoque des années plus tard autour d’un repas en famille : "Tu te souviens, quand j’étais petit ?..." Mais j’y travaille. Mon objectif, c’est que ce que je construis aujourd’hui me permette demain d’être vraiment présent pour eux.








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